VOUS ALLEZ ADORER CETTE SIMULATION
Abri suisse de protection civile – THÉORIQUE MAIS IRRÉALISTE
LES NORMES DE CONSTRUCTIONS D’UN ABRI PC EN SUISSE
Vous savez qu’en Suisse, et certains nous l’envient, la loi impose, selon des normes qui ne s’allègent pas, de fournir un abri PC (protection civile) dans chaque immeuble locatif.
Je vous propose un petit exercice de dimensionnement. C’est un petit exercice mathématique et logique. Tous les éléments que je vous fournis ici sont publics et disponibles librement. Je ne trahis rien, ni ne dévoile rien de classé « secret défense ».
Je vous propose ma place d’architecte le temps de dimensionner un abri. Rassurez-vous, il ne s’agit pas de mesurer l’épaisseur des dalles ni des murs. Cela vous est fourni par un ingénieur.
À VOS MÈTRES, CALCULATRICES ET SURTOUT À VOTRE BON SENS.
Si vous voulez obtenir un permis de construire de l’abri (obligatoire pour tout bâtiment de plusieurs logements en Suisse), il vous faut partir de données réelles, d’un cas concret.
Par cet exercice, vous allez dimensionner un abri PC, vérifier son espace et son organisation intérieure. Une sanction d’abri obtenue et construite vous permet d’être confronté à un cas existant.
La réalité est un peu plus complexe.
LA RÉALITÉ NE SE TROUVE PAS DANS LA PREMIÈRE IMAGE.
La réalité tient beaucoup plus de l’image n° 2 que de l’image n° 1. Elle tient également de l’image n° 3 pour des raisons d’odeur, mais c’est un autre problème.
Après avoir vécu le confinement, vous êtes-vous demandé comment vous réagiriez à un séjour dans un abri PC ? Au cours de votre vie, y avez-vous déjà passé quelques jours – en simulation réelle – avec des gens que vous ne connaissez pas, dans une promiscuité et un cadre lugubre, sans vue, sans contact ni accès à l’extérieur, sans eau courante, ni électricité ?
Pour une très large majorité des gens vivant en Suisse, la réponse est NON. Et cela, pour deux raisons principales :
a) RAISON n° 1 : Les abris n’ont jamais servi pour leur objectif premier, à savoir la protection de la population résidente en cas de guerre, et c’est tant mieux. Il n’y a aucun intérêt pour qu’on entraîne les gens pour quelque chose à la probabilité nulle.
b) RAISON n° 2 : Elle est à découvrir par ce petit test. Réponse en fin d’article.
En effet, en plus des vérifications mathématiques, vous allez confronter votre expérience vécue lors du confinement COVID. Vous allez faire profiter de votre expertise et réfléchir sur les conséquences « sociales » d’un abri.
Vous serez ensuite libéré du rôle d’architecte et pourrez retourner à votre vie « au grand air » … ou persévérer et participer au dimensionnement du reste du logement.
SPÉCIALISTE DE LA FOULE
Avant cela, je vous invite à aller voir une vidéo d’un spécialiste des problèmes de foules. Vous allez apprendre et comprendre beaucoup de choses.
Démonstration simple et brillante
POUR FAIRE L’HISTOIRE COURTE
Un abri PC est une boîte en béton armé, très solide, très rigide, répondant à des critères extrêmement précis qui ne font que de se compliquer d’années en années. Cette boîte a une porte d’entrée blindée en béton armé. Elle a également un volet blindé qui donne accès à un conduit d’évacuation.
L’espace est bâti selon une règle simple*. On calcule la surface au sol en allouant 1 m² par place protégée, en ajoutant 1 m² pour l’appareil de ventilation et 1 m² par WC.
(* les spécialistes suisses comprendront les simplifications nécessaires faites dans cet article)
Voici un abri sanctionné et pouvant recevoir 36 personnes. Je vous propose qu’il serve de cadre de notre petit test.
Un abri, c’est plutôt ça. Image théorique proche de la réalité. Et un abri réel de 36 places, c’est exactement comme ça.
LA RÉALITÉ EST UN PEU MOINS GLAMOUR
En plus des dimensionnements de la densité au sol, l’abri est aussi régi selon des normes de densité volumétrique. Le volume minimum est de 2.50 m³ par place protégée. Raison pour laquelle, il y a toujours beaucoup plus de lits que dans l’image de tête de l’article. L’abri, avec son mur et certainement une trentaine de lits supplémentaires, paraîtrait moins accueillant.
REPRENONS NOTRE CAS
L’abri contient des lits dortoir de 190 cm sur 70 cm sur 3 niveaux. C’est-à-dire que la densité – contrairement aux tomates – se calcule sur 1 niveau durant le jour et 3 niveaux durant la nuit.
Petite approche réelle illustrée des fameuses tomates
Pour un abri entre 25 et 50 places protégées, (notre cas), vous vivez dans un seul espace dans lequel se trouvent aussi deux cabines WC « sèches » et un appareil de ventilation pouvant fonctionner manuellement.
DENSITÉ DE NUIT
Chaque place protégée est constituée d’un lit-dortoir de 70 cm de large et de 190 cm (+ 10 cm d’espace en tête du lit) de long. Ce qui veut dire que vous avez à vos côtés tous les 70 cm quelqu’un qui (ronfle — se plaint — tousse — pleure) dort et ceci sur 3 niveaux. Tous les 70 cm horizontalement et 1 niveau supérieur et 1 niveau inférieur. Si quelqu’un se lève pendant la nuit….. bref, vous avez compris.
DENSITÉ DE JOUR
Chaque place protégée (personne autorisée à séjourner dans l’abri) a une surface « disponible » de 1 m². Lorsque vous avez soustrait la surface du lit (considérée dans mon article comme surface nuit) il vous reste une surface « jour » non spécifiquement attribuée (contrairement à votre lit).
QUESTION N° 1 : quelle est la surface par personne durant la nuit ?
À vos calculatrices : (mon conseil : faites le calcul pour 3 places protégées comme dans l’exemple).
RÉPONSE N° 1a : Elle se trouve à côté de l’image.
RÉPONSE N° 1b : Je vous fais ici un calcul un peu différent, mais avec les mêmes données de base. Mon abri est prévu pour 36 personnes. La surface minimale est de 1 m² par personne x 36 soit 36 m². (À laquelle il faut rajouter 1 m² pour l’appareil de ventilation et 2 x 1 m² pour les 2 WC.)
SURFACE MINIMALE DE L’ABRI : (1 x 36) + 1 + 2 = 39 m² (minimum valable pour autant que le volume minimum soit également atteint).
SURFACE NUIT PAR PERSONNE : constituée d’un lit-dortoir de 70 cm de large et de 190 cm (+ 10 cm d’espace en tête du lit) de long, elle est utilisée par 3 personnes conjointement (sur 3 niveaux).
Soit : (1.90 + 0.1) x 0.70 x 36 / 3 = 16.80 m² pour l’emprise au sol des 36 lits dortoirs.
Soit : un lit 1.90 x 0.70 = 1.33 m²* superposé pour une emprise au sol de 0.46 m²*.
(* la différence vient du fait que le lit est 10 cm plus court que la place allouée).
QUESTION N° 2 : quelle est la surface par personne durant le jour ?
Retour à vos calculatrices : (mon conseil : faites le calcul théorique même si ce sont des humains et non des cageots ou des cartons de déménagement).
RÉPONSE N° 2a : Elle se trouve à côté de l’image.
RÉPONSE N° 2b : Vous pouvez poursuivre le calcul commencé ci-dessus. Vous arriverez au même résultat.
SURFACE JOUR PAR PERSONNE : constituée du solde à disposition.
Soit : 36 m² dont à déduire 16.80 m² de l’emprise au sol des lits dortoirs, il reste 19.20 m² pour que 36 personnes (dites protégées) passent la journée et plusieurs si c’est nécessaire.
(* les 3 m² des « WC et ventilation » ne sont pas pris en compte dans ce calcul).
Chaque personne a donc 0.53 m² à sa « disposition », soit un carré de 73 cm x 73 cm, sans Wifi, ni probablement électricité. Cette surface met en jeu le rayon de proxémie, c’est-à-dire l’espace d’intimité nécessaire pour ne pas se sentir agressé et être mal à l’aise par la présence systématique de personnes trop proches, comme vous l’aurez appris dans la vidéo.
Car avec cet espace alloué de 73 cm x 73 cm, il faudra gérer les activités (actionner manuellement la ventilation) et les déplacements (jusqu’aux toilettes par exemple), jusqu’à vos copains, voisins, parents et en retour jusqu’à votre lit.
Certaines personnes pourraient passer la journée sur leur lit (allongées pour celles des étages supérieurs et peut-être assises pour l’étage du bas). Sans grande amélioration « sociale ».
Illustrations des densités THÉORIQUES pendant la(les) nuit(s) et pendant le(s) jour(s).
D’autres normes très contraignantes sur la position de l’abri dans le bâtiment, son utilisation en temps de paix (actuellement 100% du temps depuis sa construction), sa voie d’évaluation, son entretien (qui commence de devenir un problème pour les plus anciens) ont des coûts qui pénalisent tous les loyers et les aides publiques dans les bâtiments locatifs à loyers modérés.
POUR RÉSUMER
Techniquement, c’est très bien fait. Tout est contrôlé par un service, et en général ce sont des gens charmants. Des nombreux abris que j’ai construits, je n’ai jamais eu à me plaindre de ces offices. C’est assez rare pour mériter d’être relevé.
C’est sérieux et les futurs occupants, si par malheur ces locaux devaient être utilisés dans leur fonction de base, à savoir la protection de la population en cas de guerre, peuvent être assez confiants.
Socialement, c’est une autre histoire. Oui, parce que ces abris n’ont JAMAIS été utilisés dans leur but premier. Bien sûr, ils reçoivent quelques réfugiés dans des moments de crise, ou quelques activités spéciales. Mais, ils ne sont jamais confrontés à un cas de guerre. Sans développer une polémique, comme nous avons tous vécu un confinement (beaucoup plus agréable en tous points de vue), c’est le moment de s’en préoccuper et de se poser les bonnes questions.
C’est là tout l’intérêt du petit jeu auquel je vous ai convié en tant qu’experts en confinement que vous êtes devenus grâce au COVID.
QUELLES LEÇONS AVEZ-VOUS TIRÉES DU CONFINEMENT ?
QUESTIONS À VOUS LES EXPERTS :
- De combien de m² par personne avez-vous bénéficié ?
- Était-ce suffisant ?
- Quelles ont été les principales réactions et décisions qui vous ont fait modifier votre vision de l’espace (peut-être en parallèle à votre entourage social et professionnel) ?
- Comment avez-vous traité ce bouleversement ?
- Quelles décisions avez-vous prises ?
- Qu’attendez-vous des prochains logements ?
- Qu’avez-vous déjà modifié et qu’êtes-vous prêts à changer ?
Mesdemoiselles, Mesdames et Messieurs les experts, gardez vos calculatrices et votre bon sens. Vous serez étonnés. Il y a une autre manière de faire.
EN ATTENDANT : MON CONSEIL
À défaut de faire des exercices « grandeur nature » et d’en tirer les conséquences politiques (je fantasme…), on pourrait conseiller aux « éventuels-futurs-occupants » des abris, un entrainement de vie en groupe. Retrouvez-vous, régulièrement, dans un ascenseur et attendez qu’il soit plein pour actionner le bouton de départ. Faites l’exercice un jour de pluie, avec des enfants fatigués, le couple du 4ᵉ étage aigri par la vie et le jeune étranger et son chien…
Lorsque vous utiliserez cet ascenseur pour descendre dans l’abri, préparés à côtoyer des personnes de caractères différents, vous aurez le choix de sortir au rez-de-chaussée en faisant face à votre destin en toute connaissance de cause, ou d’accepter une réclusion que vous n’avez pas méritée en descendant jusqu’au sous-sol.
Joie quotidienne à l’entraînement en vue d’une qualification pour l’accès à un abri PC
MAIS AU FAIT :
Je vous avais promis une seconde raison en fin d’article. La voici et vous pouvez certainement la comprendre, peu importe que vous soyez vacciné au non.
b) RAISON n° 2 : les conséquences « sociales » seraient trop importantes, voire désastreuses, comme l’a montré l’apparition soudaine d’un nouveau critère.
Comment réagirez-vous, si malgré tout, vous prenez le chemin du sous-sol, aguerri à la vie en groupe, résigné à suivre les ordres, et qu’à la porte de l’abri, contre toute attente, on vous refuse l’entrée, à vous ou l’un de vos proches ? Si, par exemple, les gens étaient triés selon un nouveau critère* sorti de nulle part ? Quelle sera votre décision si un de vos proches est rejeté ? Impensable ? Pas autant que ça…
(nouveau critère* : imaginez que vous soyez vacciné, contrairement à votre fille ou à votre femme, et que pour cette raison, on leur refuse l’accès à l’abri. Inconcevable il y a à peine 3 ans).
Restons positifs : la Suisse étant le seul pays avec cette contrainte d’abri PC, nous voyons deux options.
1.- Trouver un tiers qui construise l’abri PC selon les normes suisses (et le paie).
2.- Ne pas construire en Suisse.